Ingrid JONKER

Ingrid JONKER



Poète de langue afrikaans et issue de la communauté afrikaner, Ingrid Jonker est née en 1933, près de Kimberley, dans la province du Cap. Ses parents s'étaient séparés avant même sa naissance. Ingrid Jonker et sa sœur Anna sont élevées par leur père et sa troisième épouse. À l'âge de treize ans, Ingrid Jonker écrit son premier recueil de poèmes (Na die somer - après l'été). Son premier livre (Ontvlugting - la fuite) paraît en 1956, alors qu'elle a vingt-trois ans. En 1956 elle épouse Pieter Venter, et leur fille Simone naît en 1957. Le couple s'installe à Johannesburg, avant de se séparer trois ans plus tard. Ingrid Jonker revient vivre au Cap. Son père, député du parti national, est nommé président de la commission de censure du parlement sud-africain. À son grand embarras, sa fille est une opposante politique au pouvoir en place. Leur différend s'étale sur la place publique. Le père renie sa fille en plein débat parlementaire. À la même époque, Ingrid Jonker entretient une liaison avec deux écrivains engagés : Jack Cope et André Brink. L'un des deux était responsable de sa grossesse non désirée. Ingrid Jonker se fait avorter : l'avortement était un crime selon les lois sud-africaines de l'époque. Le rejet de son père et l'acte d'avortement contribuent à la dépression d'Ingrid Jonker, qui prend la décision de se faire interner, en 1961, à l'hôpital psychiatrique de Valkenberg. En 1963, un nouveau recueil de ses poèmes est publié. L'accueil du public de langue afrikaans est hostile, car Jonker est cataloguée comme écrivaine progressiste, au côté de Breyten Breytenbach, André Brink, Adam Small et Bartho Smit. Jonker remporte malgré tout le prix littéraire de la presse de langue afrikaans, qui lui permet de partir voyager en Europe. Après le refus de Jack Cope de l'accompagner, c'est au bras d'André Brink qu'elle visite Paris et Barcelone. C'est au cours de ce voyage, que Brink lui annonce qu'il refuse de quitter son épouse et qu'il retourne en Afrique du Sud. Dans la nuit du 19 juillet 1965, tourmentée dans sa vie personnelle et désespérée par la situation de son pays, Jonker se rend sur une des plages du Cap, entre dans la mer et s'y noie. Après son suicide, les Sud-Africains "oublièrent" Ingrid Jonker, disparue à l'âge de trente-deux ans. Sa mémore et sa poésie ressurgirent brusquement, lorsque le 24 mai 1994, Nelson Mandela évoqua Ingrid Jonker durant son discours d'ouverture de la session parlementaire, avant de lire son poème le plus célèbre :  « Die Kind », au sujet d'un enfant noir tombé sous les balles d'un policier blanc. Paula van der Oest a adapté la vie du poète au cinéma : « Ingrid Jonker », film sorti en 2011. À lire (en français) : L'Enfant n'est pas mort (éd. Le Thé des Ecrivains, 2012).

Karel HADEK

(Revue Les Hommes sans Épaules).

 

 



Publié(e) dans la revue Les Hommes sans épaules


 
Dossier : LES POETES DANS LA GUERRE n° 15